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Page:Roland Manon - Lettres (1780-1793).djvu/354

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À ROLAND [À PARIS[1].]
Le 21, au matin [août 1783, — d’Amiens ].

Enfin la grande affaire des mécaniques est terminée ; elles ont été emballées hier soir, ce qui a demandé trois heures et n’a fini qu’à près de dix. Je suis demeurée présente à l’opération pour y concourir par mes avis, et aussi pour veiller au feu, car la cour étant embarrassée par des tonnes et cuviers, il a fallu emballer près du bois et de l’écurie. La chandelle au milieu de la paille et de toutes ces choses me faisait trembler ; il faisait du vent, et, en y mettant tous mes soins, j’ai encore eu peur d’une odeur de brûlé qui cependant venait du voisinage. Il m’en a coûté une caisse de 9tt ; j’envoie ce matin et le ballot et la lettre d’avis. Pour compléter cette journée, ma fille s’est faite au front la première bosse qu’elle ait encore eue, par une chute sur le pavé, en tombant les deux marches de la salle que le tracas de lessive avait rendues glissantes. Je n’étais pas témoin de l’accident, mais la marque en demeurera plus d’un jour. Et le soir, en jouant autour de nous, l’enfant se mit à mâcher un bout de corde. Je m’en aperçus, le retirai ; le petit cœur se souleva, Eudora vomit partie de son souper ; j’ai craint qu’elle n’eût avalé quelque chose, cela m’a tourmentée, fatiguée, chagrinée ; je n’ai pu manger, je n’ai point dormi et je ne suis ni forte, ni gaie. Cependant ma fille a bien passé la nuit, j’espère qu’elle n’aura rien : elle court, joue et mange comme de coutume. Je vais faire de la musique ce matin pour remettre la machine en équilibre, et je ferai sortir la petite pensionnaire afin d’avoir à me

    nach royal de 1783, p. 271, dit : « Taillards de Saint-James, inspecteur à Châlons-sur-Marne ».

  1. Ms. 6238, fol. 247-248. — Dans un coin : « M. de Laplatière ». Une note, d’écriture ancienne, dit « Probablement août 82. Conjecture inadmissible. Le rapport de cette lettre avec celle qui précède et surtout avec celles qui suivent prouve qu’il faut lire août 1783