remis de mes mémoires ; je dois retourner le voir demain à son bureau. C’est à lui, tout juste, que M. de Calonne fera remettre les mémoires aussitôt qu’ils auront été présentés là ce ministre, et c’est lui qui doit les expédier à M. Bld. [Blondel], Je tirerai parti de cet homme terrible ; j’ai vu aujourd’hui un rayon de sensibilité percer son austère gravité ; on le dit vraiment honnête ; le père d’Antic le connaissait. Sa femme est très aimable, je suis demeurée un bon quart d’heure avec elle et j’irai la revoir ; elle a beaucoup d’usage, un air extrêmement agréable et, je crois, de l’esprit. Elle connaît Mme de Buchères[1], qui vit ici maintenant et qui a marié son fils, dont l’histoire que tu sais fait qu’il n’a point d’état.
Demain je revois et presse tous mes gens pour me procurer l’appui de recommandations, car j’espère que j’en aurai besoin, c’est-à-dire que M. de Calonne ne rejettera pas du premier abord, mais recevra les mémoires. Je vais remuer comme un lutin, peut-être pour faire de l’eau toute claire, mais enfin les possibles seront épuisés et nous n’aurons plus qu’à nous tenir tranquilles : c’est le pis aller.
Mme d’Arbouville n’a pas d’idée des moyens de demander le cordon n[oir][2]. Mais, comme elle l’a fort bien remarqué, si c’est plus aisé, il sera temps de se rejeter à cela si l’entreprise manque.
J’ai rencontré dans mon chemin l’ami d’Antic, qui allait de compagnie pour ses affaires et qui doit venir me voir demain. Je n’ai point retrouvé Flesselles, qui sera arrivé à Paris vers l’heure où j’en suis partie ; tu le verras dans peu. Je lui ai écrit une lettre qui lui sera remise avec tous mes paquets par le frère qui veillera au tout.
Je me meurs de faim ; je vais manger et me coucher. Demain, à six heures sur pied, en petite coiffe toute plate, je vais courir les bureaux et pizzicar la gente. L’abbé doit venir me dire l’après-midi ce qu’aura répondu M. de Calonne.