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BEETHOVEN

sentiment de race, d’abord, — quoique, plus tard, Joséphine. causant avec Thérèse, dise mélancoliquement que « l>ieK rarement il est permis à une certaine classe de choisir un compagnon selon son cœur... 1 » Mais surtout l’incompatibilité d humeur. Les Brunsvik étaient trop intimes avec Beethoven pour ne pas être instruits du caractère intraitable de leur grand ami, et de l’accablante menace de cette surdité progressive, dont la nuée pesait sur son avenir. Les deux sœurs de Pepi avaient les meilleures raisons pour la mettre en garde contre une telle liaison. La fragile œuvre d’art, qu’était l’exquise Joséphine, élégante et malade, ne se levant de sa chaise longue que pour ses réceptions mondaines ou ses exercies de piano, inapte à la vie pratique, •— la voit-on dans les mains d’un Beethoven ?

Ces deux mondes différents, ces deux malades ensemble,

qu’eussent-ils fait, l’un de l’autre ?

Plus tard, Thérèse s’est pourtant reproché d’avoir con* 11. Et elle ajoute que « un grand malheur » (29 mai 1810), (Journal inédit de Thérèse.)

Mais le mot même : « rarement s> n’exclut donc pas toute possibilité. Et les trois sœurs Brunsvik étaient capables de considérer Beethoven, non seulement comme leur égal, mais comme leur supérieur. — Au reste, leur frère Franz devait faire plus tard un mariage bourgeois, avec une musicienne.

Je dois pourtant ajouter que Joséphine, par la suite, affichera un sentiment très vif d’orgueil aristocratique, dont le Journal inédit de Thérèse enregistre souvent l’expression. Ce Irait semble s’être affirmé et durci, après son second mariage avec le baron Stackelberg. Peut-être Je souvenir de certaines humiliations dans la société de Vienne, aux premiers temps de son mariage avec Deym, lui était-il resté cuisant.