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Page:Rolland - Beethoven, 5.djvu/118

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BEETHOVEN

maladie), il faut bien se garder de dédier l’œuvre à la maladie (« morbo dicatum »), comme l’a fait le critique A. B. Marx, qui y a cherché, d’un bout à l’autre, la description psychophysiologique de la maladie[1], — à la façon d’un poème symphonique de Richard Strauss. La nature de Beethoven est trop vive et trop souple, son tempérament a trop de ressort, pour qu’on puisse fixer une de ses grandes œuvres à un état d’âme et de morbidité, vite dépassé. Si sa raison, sa puissante volonté savent toujours tenir la barre, en dépit de vents et marées, et imprimer à chacune de ses œuvres une indestructible unité, — les éléments de sensibilité qui la constituent sont très variés ; on ne peut les lire qu’en suivant les étapes de sa création. La première tâche du critique eet donc, d’abord, d’établir, dans la mesure du porsinie, les dates de la composition.

Or, dans les premiers mois de 1825, où Beethoven dessinait le premier et le dernier morceaux du quatuor, il était encore le Beethoven orageux et chargé de foudre, dont on ménageait les emportements redoutables. C’est au mois de mars que, fulminant contre l’exécution manquée de son quatuor en mi bémol, par Schuppanzigh, il envoie ordre au violoniste Joseph Bôhm d’en préparer sur-le-champ une nouvelle audition, pour réparer son honneur ; il n’admet aucune

  1. « Le lieu de la scène, pour tout le poème musical, est le lit de malade. » (Der Schauplatz des ganzen Tongedichtes sei das Sechbett. »).

    D’après la description de A. B. Marx, le premier morceau est la maladie en personne. Le deuxième, le bien-être de la guérison. Le finale, le rétablissement incomplet d’un organisme qui reste marqué par le passage de la maladie. — Le tout, décrit minutieusement, avec une précision de détails impressionnants… Le malheur est que, dans son diagnostic, A. B. Marx n’a pas tenu compte des dates exactes et des circonstances de la création, que nous allons rétablir ici.