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Page:Rolland - Beethoven, 5.djvu/328

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BEETHOVEN

de son côté le bon droit et l’humanité[1]. Au lieu de s’en montrer touché, Beethoven passe outre, et il écrit au magistrat chargé de l’affaire deux lettres, d’une violence injurieuse contre la mère, afin de lui faire interdire l’accès du fils.

Cependant, Breuning qui, après avoir refusé l’honneur peu enviable de la tutelle, l’accepte, pour en décharger Beethoven, prend en main toute l’affaire ; il va voir le Feldmarschall Lieutenant v. Stutterheim, et obtient de lui qu’il prenne Charles dans son régiment, qui est caserné à Iglau. Il n’a plus qu’à présenter Charles à Stutterheim ; et en cinq ou six jours, tout sera réglé.

Mais que se passe-t-il ?… Quand il ne reste plus qu’une simple visite à faire, pour que Charles réalise ce qu’il prétend l’objet de ses vœux, (se repentirait-il déjà de son choix ?), le jeune homme n’est plus pressé. Beethoven ne l’est pas davantage. Charles objecte qu’il ne peut pas se présenter au général, avant que ses cheveux aient repoussé, pour masquer les traces de sa blessure. Il demande un délai de quinze jours, au plus. En attendant, comme l’hôpital, le déclarant

  1. « Je désire ne rien entendre sur elle, qui soit à son désavantage ; ce n’est pas à moi de la juger. Si je lui consacrais le peu de temps que j’ai à rester encore ici (à l’hôpital), ce ne serait encore qu’un faible « Ersatz », pour tout ce qu’elle a souffert à cause de moi. En aucun cas, je ne la traiterai avec plus de froideur qu auparavant : on pourra dire ce qu’on voudra. » (Cahiers de conversations).

    En général, Charles paraît, dans ces entretiens écrits, le plus souvent à son avantage. Il sait être calme et ferme, dans la défense de ses affections (et particulièrement de son camarade Nicmetz, que Beethoven n’a jamais pu souffrir). Il maintient dignement ce qu’il pense, sans discussions inutiles. Du vieux homme et du jeune, il semblerait parfois que le jeune fût le plus mûr. Jamais Beethoven n’est maître de sea ressentiments, de ses transports.