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JEAN-CHRISTOPHE À PARIS

tuelles, il lui attribua aussitôt la responsabilité de la faute qu’il prêtait à Olivier ; et il y avait pour lui une souffrance de jalousie insupportable à penser qu’un homme de cette espèce avait pu lui enlever l’affection de son ami, comme il l’avait déjà évincé de l’amitié de Colette Stevens. Pour achever de l’exaspérer, le même jour, lui tomba sous les yeux un article de Lucien Lévy-Cœur, à propos d’une représentation de Fidelio. Il y parlait de Beethoven sur un ton de persiflage, et raillait agréablement son héroïne pour prix Montyon. Christophe voyait mieux que quiconque les ridicules de la pièce, et même certaines erreurs de la musique. Il n’avait pas toujours montré lui-même un respect exagéré pour les maîtres reconnus. Mais il ne se piquait point d’être toujours d’accord avec lui-même et d’une logique à la française. Il était de ces gens qui veulent bien relever les fautes de ceux qu’ils aiment, mais qui ne le permettent pas aux autres. C’était d’ailleurs tout autre chose de critiquer un grand artiste, si âprement que ce fût, à la façon de Christophe, par foi passionnée dans l’art, et même — (on pouvait dire) — par un amour intransigeant pour sa gloire, qui ne supportait point en lui la médiocrité, — ou de ne chercher dans ces critiques, comme faisait Lucien Lévy-Cœur, qu’à flatter la bassesse du public et à faire rire la galerie, en montrant son esprit aux dépens d’un grand homme. Puis, quelque libre que fût Christophe