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Page:Rolland - Jean-Christophe, tome 1.djvu/33

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Le vaste flot des jours se déroule lentement. Immuables, le jour et la nuit remontent et redescendent, comme le flux et le reflux d’une mer infinie. Les semaines et les mois s’écoulent et recommencent. Et la suite des jours est comme un même jour,

Jour immense, taciturne, que marque le rythme égal de l’ombre et de la lumière, et le rythme de la vie de l’être engourdi qui rêve au fond de son berceau, — ses besoins impérieux, douloureux ou joyeux, si réguliers, que le jour et la nuit qui les ramènent semblent ramenés par eux.

Le balancier de la vie se meut avec lourdeur. L’être s’absorbe tout entier dans sa pulsation lente. Le reste n’est que rêves, tronçons de rêves, informes et grouillants, une poussière d’atomes qui dansent au hasard, un tourbillon vertigineux qui passe et fait rire ou horreur. Des clameurs, des ombres mouvantes, des formes grimaçantes, des douleurs, des terreurs, des rires, des rêves, des rêves… — Tout n’est que rêve, et le jour, et la nuit… — Et,

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