Page:Rolland - Jean-Christophe, tome 5.djvu/108

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Était-ce ce sentiment de pitié, mélancolique et orgueilleuse, qui lui inspirait malgré tout une sympathie pour cette œuvre ? Toujours est-il qu’elle l’intéressait, plus qu’il n’en voulait convenir. Quoiqu’il persistât à répondre à Sylvain Kohn, au sortir du théâtre, que « c’était très fin, très fin, mais que cela manquait de Schwung (d’élan), et qu’il n’y avait pas là assez de musique pour lui », il se gardait bien de confondre Pelléas avec les autres œuvres musicales françaises. Il était attiré par cette lampe qui brûlait au milieu du brouillard. Il apercevait encore d’autres lueurs, vives, fantasques, qui tremblotaient autour d’elle. Ces feux-follets l’intriguaient : il eût voulu s’en approcher pour savoir comment ils brillaient ; mais ils n’étaient pas faciles à saisir. Ces libres musiciens, que Christophe ne comprenait pas, et qu’il était d’autant plus curieux d’observer, étaient peu abordables. Ils semblaient manquer de ce grand besoin de sympathie, qui possédait Christophe. À part un ou deux, ils paraissaient peu lire, peu connaître, peu désirer connaître. Presque tous vivaient à l’écart, les uns hors de Paris, les autres à Paris,

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