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JEAN-CHRISTOPHE À PARIS

était facile de deviner que la sauvagerie d’Antoinette tenait en partie à la gêne où elle se trouvait, elle avait même voulu lui offrir de jolies toilettes, que l’orgueil d’Antoinette avait refusées ; mais l’aimable protectrice s’y était prise de telle sorte qu’elle avait trouvé moyen de la forcer à accepter quelques-uns de ces petits cadeaux, qui sont si chers à l’innocente vanité féminine. Antoinette en était à la fois reconnaissante et confuse. Elle se forçait à venir, de loin en loin, aux soirées de Mme Nathan ; et, comme elle était jeune, elle y trouvait, malgré tout, du plaisir.

Mais dans ce monde un peu mêlé, où venaient beaucoup de jeunes gens, la petite protégée de Mme Nathan, pauvre et jolie, avait été aussitôt le point de mire de deux ou trois polissons, qui avaient jeté leur dévolu sur elle, avec une parfaite assurance. Ils spéculaient d’avance sur sa timidité. Elle avait même fait l’enjeu de paris entre eux.