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ANTOINETTE

pouvait être mise en cause. D’aliments plus sérieux, on ne lui en offrait pas. Il n’avait pas de pain, il mangeait du gâteau. C’est ainsi que, par la force des choses, Cimarosa, Paesielio, et Rossini devinrent les nourriciers de ce petit garçon mélancolique et mystique, dont la tête tournait un peu, en buvant l’Asti spumante, que lui versaient, au lieu de lait, ces pères Silènes hilares et effrontés, et les deux petites Bacchantes sautillantes de Naples et de Catane, au sourire ingénu et lascif : Pergolèse et Bellini.

Il jouait beaucoup de musique, tout seul, pour son plaisir. Il en était imprégné. Il ne cherchait pas à comprendre ce qu’il jouait, il en jouissait passivement. Personne ne songeait à lui faire apprendre l’harmonie ; et lui-même ne s’en souciait pas. Tout ce qui était science et esprit scientifique était étranger à la famille, surtout du côté maternel. Tous ces hommes