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Page:Rolland - Jean-Christophe, tome 7.djvu/88

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JEAN-CHRISTOPHE À PARIS

Il avait appris la médecine, afin de se rendre utile. Un jour qu’il était entré chez un ouvrier du quartier, il avait trouvé des malades, il s’était mis à les soigner ; il avait quelques connaissances médicales, il avait entrepris de les compléter. Il ne pouvait voir un enfant souffrir : cela lui déchirait le cœur. Mais aussi, quelle joie exquise, quand il était parvenu à arracher au mal un de ces pauvres petits êtres, quand un pâle sourire reparaissait, pour la première fois, sur le visage maigriot ! Le cœur de Watelet se fondait. C’étaient là des minutes de paradis. Elles lui faisaient oublier les ennuis qu’il avait trop souvent avec ses obligés. Car il était rare qu’ils lui témoignassent beaucoup de reconnaissance. D’autre part, la concierge était furieuse de voir tant d’individus aux pieds sales monter son escalier : elle se plaignait aigrement. Le propriétaire, inquiet de ces réunions d’anarchistes, faisait des observations. Watelet songeait à quitter l’appartement ; mais il lui en coûtait : il avait ses petites manies ; il était doux et tenace, il laissait dire.

Christophe gagna un peu sa confiance, par l’amour qu’il témoignait aux enfants. Ce fut le lien commun. Christophe ne pouvait rencontrer la fillette, sans un serrement de cœur : car, sans qu’il pût dire pourquoi, par une de ces mystérieuses analogies de formes, que l’instinct perçoit immédiatement, en dehors de la conscience,