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Page:Rolland - Jean-Christophe, tome 9.djvu/293

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LE BUISSON ARDENT

Dès que Christophe entendit ce bruit familier, il alla chez Anna. Il fallait qu’il lui parlât. Une inquiétude le travaillait. Il arriva à la porte, il tourna le bouton : la porte était fermée. Il frappa doucement : point de réponse. Il colla sa bouche contre la serrure, supplia à voix basse, puis avec insistance : nul mouvement, nul bruit. Il avait beau se dire qu’Anna dormait, une angoisse le prit. Et comme, tâchant vainement d’entendre, il appuyait sa joue contre la porte, une odeur le frappa, qui semblait sortir du seuil ; il se pencha, et il la reconnut : c’était l’odeur du gaz. Son sang se glaça. Il secoua la porte, sans penser qu’il pouvait réveiller Bäbi : la porte ne céda pas… Il avait compris : Anna avait, dans le cabinet de toilette attenant à sa chambre, un petit poêle à gaz ; elle l’avait ouvert. Il fallait défoncer la porte ; mais dans son trouble, Christophe garda assez de raison pour se rappeler qu’à aucun prix Bäbi ne devait entendre. Il pesa sur un des battants, d’une énorme poussée, en silence. La porte, solide et bien close, craqua sur ses gonds, mais ne bougea point. Une autre porte donnait accès de la chambre d’Anna au cabinet de Braun. Il y courut. Elle était également fermée ; mais ici, la serrure était en dehors. Il entreprit de l’ar-