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Page:Rolland - Jean-Christophe, tome 9.djvu/85

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Ainsi, la griserie des passions qui l’entouraient se communiquait à Christophe. Ensuite, il s’étonnait de ces accès d’éloquence. Mais il n’y attachait pas d’importance. Il s’amusait de cette excitation légère, qu’il attribuait à la bouteille. Il regrettait seulement que la bouteille ne fût pas meilleure ; et il vantait ses vins du Rhin. Il continuait de se croire détaché des idées révolutionnaires. Mais il se produisait ce phénomène singulier que Christophe apportait à les discuter, voire à les soutenir, une passion croissante, tandis que celle de ses compagnons semblait, par comparaison, décroître.

Par le fait, ils avaient moins d’illusions que lui. Même les meneurs les plus violents, ceux qui étaient le plus redoutés par la bourgeoisie, étaient incertains au fond et diablement bourgeois. Coquard, avec son rire d’étalon qui hennit, faisait la grosse voix et des gestes terribles ; mais il ne croyait qu’à demi à ce dont il parlait : plaisir de parler,

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