ANNETTE ET SYLVIE 129
faisais souffrir ; et même, — Annette, écoute ! — et même cela me faisait plaisir !
Annette avait le cœur étreint ; et elle songea qu’elle aussi, tout à l’heure, elle se serait délectée à voir souffrir Sylvie, à la faire souffrir jusqu’au sang. Elle le dit. Leurs bras se serrèrent.
— Mais qu’est-ce qu’on a ? qu’est-ce qu’on est ? se demandaient-elles, honteuses et écrasées, soulagées tout de même de penser que l’autre avait été pareille…
— On aime, dit Sylvie.
— On aime répéta machinalement Annette.
Elle reprit, effarée :
— C’est ça, l’amour ?
— Et tu sais, dit Sylvie, ça ne fait que commencer.
Annette, avec énergie, protestait qu’elle ne voulait plus aimer.
Sylvie se moqua d’elle. Mais Annette, très sérieuse, répétait :
— Je ne veux plus. Je ne suis pas faite pour ça.
— Ah bien, fit Sylvie en riant, pas de chance, ma pauvre Annette ! Toi, tu cesseras d’aimer, quand tu cesseras de vivre !