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266 L'AME ENCHANTEE

— Il faut nous séparer, Roger, c’est douloureux, mais il le faut. J’ai vu que c’était impossible, impossible que je sois votre femme…

Elle voulait continuer. Mais il l’en empêcha :

— Non, non, ce n’est pas vrai !… Taisez-vous ! taisez-vous ! Vous êtes folle !…

Elle dit :

— Il faut que je parte, Roger.

Il cria :

— Partir, vous !… Je ne veux pas !…

Il lui avait saisi les bras, il les serrait brutalement. Puis, il vit la fière figure, volontaire et glacée, il se sentit perdu, il lâcha prise, il demanda pardon, il pria, supplia :

— Annette ! ma petite Annette ! Restez, restez !… Non, ce n’est pas possible… Mais qu’est-ce qui s’est passé ? Qu’est-ce que j’ai fait ?

La pitié reparut sur le visage fermé. Elle dit :

— Asseyons-nous, Roger…

(Il s’assit docilement auprès d’elle, sur un talus de mousse : ses yeux ne la quittaient point, imploraient chacune de ses paroles).

— …Soyez calme, il faut que tout soit expliqué… Je vous en prie, soyez calme !… Croyez que je dois tendre toutes mes forces pour l’être… Je ne pourrais parler, si je ne m’y forçais pas…