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ANNETTE ET SYLVIE 273

dit rien, sourit avec mélancolie. Lui, qui sentait ce regard le scruter jusqu’au fond, chercha à lui donner le change. Il pensa se montrer très épris. Il dit :

— Maintenant, Annette, vous ne pouvez plus partir : je dois vous épouser.

Le sourire triste d’Annette reparut. Elle avait bien lu en lui…

— Non, mon ami, dit-elle, vous ne devez rien.

Il s’était ressaisi.

— Je veux…

Mais elle :

— Je partirai.

Il demandai :

— Pourquoi ?

Et avant qu’elle ne l’eût dit, il avait déjà mieux compris ses raisons de partir. — Il se crut obligé pourtant à les rediscuter. Elle lui mit sur la bouche sa main. Il baisa cette main, avec une colère passionnée… Ah ! combien il l’aimait ! Il était humilié des pensées qui étaient en lui. Ne les avait-elle pas vues ?… Et la main douce et moite qui lui caressait les lèvres, semblait dire :

— Je n’ai rien vu…

D’un village lointain le tintement de cloches arrivait, par bouffées… Après un long silence, Annette soupira… Allons, cette fois, c’est la fin… Elle dit, à mi-voix :