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82 L'AME ENCHANTÉE

tout de même) — de sa telle résistance. Annette ne l’était pas davantage de son emportement. Avec consternation, elle se disait maintenant qu’elle avait coupé les ponts : au lieu d’être patiente, adroite, de conquérir Sylvie, elle l’avait presque chassée. Sylvie ne reviendrait plus, c’était un fait certain. Annette, par son dilemme, lui avait fermé sa porte, elle s’était interdit à elle-même de la lui rouvrir. Elle ne pouvait pourtant pas, après ses déclaration, aller chercher Sylvie ! C’était s’avouer vaincue. Sa fierté ne le permettait pas. Ni même son bon droit. Car Sylvie avait mal agi… Non, non, elle n’irait pas !…

Elle mit son chapeau, et alla droit chez Sylvie.

Sylvie venait de rentrer. Songeuse, elle examinait la situation embrouillé. Elle la trouvait stupide, mais elle ne voyait pas le moyen d’en sortir : car elle n’envisageait pas l’idée de se plier à la volonté d’Annette, et elle n’envisageait pas davantage celle qu’Annette plierait. Au fond, elle trouvait que la Canette n’avait pas tort. Mais elle ne voulait pas céder. Sylvie n’était pas insensible aux biens de la fortune. Ceux dont disposait Annette avaient, sans qu’il y parût, suffisamment éveillé en elle la tentation et l’envie. (On ne peut pas s’en défendre, même quand on n’est pas — presque