Aller au contenu

Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 2.djvu/185

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Il n’était pas très tendre et il n’avait aucun goût pour le vague de l’âme, où « ces femmes » se complaisent. Annette, quand elle avait son petit à côté d’elle, pas trop de préoccupations matérielles, une heure de relâche gagnée au milieu des tâches qui la talonnaient, était heureuse ; et elle n’avait pas à chercher Dieu bien loin : il était dans son cœur. Mais Marc eût trouvé que, dans son cœur, il y avait lui, Marc, et que tout le reste était des bêtises. Il faut être clair. Qu’est-ce que c’était que Dieu, au juste. L’homme là-bas, devant l’autel, avec sa jupe de fille et sa carapace dorée ? Le suisse avec sa canne et ses mollets ? Ces images peinturlurées, — une par chapelle, — qui grimaçaient des sourires fondants, comme les dames embrasseuses, qu’il n’aimait point ?…

— Maman, allons-nous-en !

— Est-ce que ce n’est pas beau ?

— Oui, c’est assez beau. Rentrons !

… Qu’est-ce que c’était que Dieu ?… Il n’avait plus insisté pour le demander à sa mère. Quand les grands avouent qu’ils ne savent pas une chose, c’est qu’elle ne les intéresse pas… Il continua seul son enquête sommaire. Des prières entendues, « Notre Père qui êtes aux cieux », — (une localisation qui excitait le scepticisme des plus éveillés parmi ces gamins modernes, pour qui les cieux étaient en train de devenir un nouveau champ de sport), — la Bible feuilletée, comme les autres vieilles histoires, avec une curiosité ennuyée, — quelques questions posées, quelques réponses happées, de-ci de-là, d’un air négligent, — « Dieu, quelqu’un d’invisible, qui avait créé le monde… » — On dit ça !… C’est trop loin. Et pas clair. Il était comme sa mère : Dieu ne l’intéressait pas. Un roi de plus ou de moins !…

Mais ce qui l’intéressait, c’était son existence à lui, et ce qui la menaçait, et ce qu’il y avait après. De stupides entretiens devant lui, chez Sylvie, avaient d’assez bonne heure éveillé son attention. Le plaisir de petit