Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 3.djvu/215

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gion, en est bien la moitié — (bien entendu, nous parlons de la seule religion qui soit en Occident une puissance d’ordre : celle de Rome) — ces traits essentiels, qui leur étaient communs avec les de Mareuil, de Thésée, de Seigy, et la petite noblesse terrienne de la province, n’avaient laissé subsister de différences entre eux que juste ce qui pouvait flatter l’amour-propre de chacun, en le persuadant qu’elles lui étaient une marque de supériorité sur son voisin. C’est le faible de tout homme. Les de Seigy et Chavannes étaient trop bien élevés pour en rien laisser voir. On doit le garder secret, pour son agrément particulier. Qu’Annette Rivière fût invitée en ce milieu, pouvait, à bon droit, surprendre. Non pas Annette, qui n’avait point le sentiment des distances. Mais la province. — De fait, elle ne l’était que par ces deux seuls membres des familles Chavannes et de Seigy, à qui les circonstances actuelles prêtaient, dans leurs maisons, des droits indiscutés : Mme Louise de Mareuil et Germain Chavannes. Tous deux avaient durement payé leur dette au nom et à la patrie. Et tous deux étaient, dans ce milieu, d’exception. Il fallut peu de jours à Annette pour le reconnaître.

La maison des Chavannes était une vieille demeure aux murs gris, dans une rue tortueuse, au pied de la cathédrale. Le silence l’entourait,