Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 3.djvu/54

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à propos ses préjugés, tacitement laissait tomber, pour un temps, ceux dont la grille lui avait servi à parquer les voisins. — M. Girerd faisait maintenant société avec M. Bernardin. Et Mesdames Bernardin, pieuses personnes, aimables mais timorées, répondaient aux avances d’Annette, avec un sourire obligeant : elles avaient décidé de ne plus se rappeler — jusqu’à nouvel ordre — leurs doutes à l’égard de la voisine énigmatique et de sa maternité, peut-être, irrégulière… On n’était pas devenus plus proches, ni plus tolérants ; on n’acceptait rien de plus, aujourd’hui qu’hier. Mais ce qu’on n’acceptait point, on feignait de l’ignorer.

Seule, la petite Mme  Chardonnet s’enfermait dans sa peine ; et elle se refusait à voir le regard affectueux de Lydia Murisier, qui lisait son tourment et offrait d’y mêler le sien, avec son espérance.

Ils étaient tous, du haut en bas, les passagers du même bateau ; et le typhon venait. Le danger les égalisait… Que la terre tout entière n’est-elle menacée ! (Elle le sera)… On verrait tous les peuples, enfin, contre la Nature, devenir l’humanité ! … Mais il faut deux conditions : l’une, qu’à aucun la chance ne soit ouverte d’échapper sans les autres ; — la seconde, qu’à tous une chance demeure d’échapper au danger : car s’il n’en était plus, l’homme abdiquerait. — Ces conditions ne