Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 4.djvu/42

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rien, ni le pour ni le contre. Toutes les folies qui passionnaient les masses humaines, la religion, la patrie, tous ces combats où elles s’épuisent, scandent la marche du Destin. L’Être s’accomplit, en se détruisant. Et le but de l’effort humain est : Rien…

Annette lui dit :

— Mon ami, ne regardez donc pas toujours autour de vous la houle, ce tourbillon vertigineux, ces grappes de peuples qui s’accrochent, qui remontent et qui retombent ! Regardez en vous ! L’un seul, le moi est un monde. J’entends en le mien un « Oui ! » éternel.

— Le mien, dit Germain, est un cercueil. J’y vois les vers.

— Vous laissez fuir la vie, de vous dans l’univers. Rappelez-la, de l’univers dans vous ! Ramassez-la sur votre poitrine, avec vos doigts !…

— Comme je ramasserai bientôt mes draps…

— Vous n’êtes pas seulement ici, dans ce lit. Vous êtes partout, dans tout ce qui vit. Cette nuit sereine, dont les ailes sombres couvent les rêves des milliers d’êtres, elle est en vous, elle est à vous ; dans votre misère, vous possédez la richesse