Page:Rolland - L’Âme enchantée, tome 6.djvu/17

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La catastrophe ne les frappa point tous les deux ensemble. L’un après l’autre. La première, Assia reçut le coup.

Elle se disposait à sortir. Marc venait de la quitter. Ils s’étaient broutés. Le store de la chambre était baissé. Soleil dehors, grondement de la rue. Assia, assise sur le lit, était vide de pensée. Lasse, un peu triste, écœurée. Il faisait lourd dans la chambre. Elle leva le store. Le soleil entra. Elle se regarda dans son miroir, les bras levés pour arranger ses cheveux ; l’éclat du jour lui faisait mal, elle cligna des yeux. La brève seconde, que les paupières s’abaissèrent et se relevèrent : une plongée… Quand elle rouvrit les yeux, ce n’était plus la même contrée ; les deux instants qui se succédaient ne se faisaient pas suite : il y avait entre eux un hiatus monstrueux. La femme aux yeux d’aveugle qui cherche sa route, ne retrouvait plus son ombre ni son soleil : elle ne retrouvait plus l’amour. Elle eut le vertige. Elle s’affaissa sur un escabeau contre le mur. Elle n’avait même pas eu la force de détacher ses deux mains jointes au-dessus de sa tête. Elles l’écrasaient, comme un chapiteau. Elle regardait devant elle, atterrée. Elle ne voyait rien. Elle ne pensait à rien. Elle pensait rien. Rien dans le cœur. Rien dans