son pouce. Et lui, avait arrêté son souffle. — Puis, ils s’écartèrent l’un de l’autre. Et leurs regards s’évitèrent.
Marc, à mi-voix oppressée, dit :
— « J’ai peur… je ne suis pas prêt… »
Annette dit :
— « Mon pauvre petit… Moi, non plus !… Je ne l’ai jamais été qu’après que la bataille était livrée… Mais c’est déjà quelque chose, de s’être fait une armée de réserve… Je te donne la mienne. »
Marc dit, sur le même ton :
— « Elle me fait presque aussi peur que l’adversaire. »
Annette rit :
— « Mon cher garçon !… Je te demande pardon… »
Marc se leva, pour partir. Près de sortir, il se retourna :
— « Maman !… Et tu peux aimer la vie ?… Mais c’est un monstre ! »
— « Il y a de beaux monstres », dit Annette.
Marc plaisanta :
— « Tu en es un. »
— « Je suis de sa race. Je n’en ai pas honte. Tâche de n’avoir pas honte de la mienne ! »
— « Si j’étais sûr que je n’aurais pas à te faire honte ! »
— Et de quoi donc ? Puisque tu viens de moi, tout ce qui vient de toi est à mon compte. Je ne proteste pas ma signature. J’endosse tout, et le présent et le futur. »
— « Jusqu’aux ordures ? »
— « Faut de l’engrais ! » dit Annette, jovialement.
— « J’ai une mère cynique », fit Marc, jouant le petit saint… « Et par-dessus le marché, elle cite Labiche ! »
— « Je citerais plus volontiers Rabelais. Mais je te ménage, ma fillette… »
— « Dis donc, dis donc ! » s’exclama Marc, vexé. « Tu crois que j’ai peur des mots et des choses ? »