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du contrat social

incompatible avec la sienne ; il faut qu’un des deux périsse ; et quand on fait mourir le coupable, c’est moins comme citoyen que comme ennemi.

Au reste, la fréquence des supplices est toujours un signe de faiblesse ou de paresse dans le gouvernement. Il n’y a point de méchant qu’on ne pût rendre bon à quelque chose. On n’a droit de faire mourir, même pour l’exemple, que celui qu’on ne peut conserver sans danger.

Rousseau examine ensuite les lois « qui ne sont proprement que les conditions de l’association civile » et dont le peuple doit être l’auteur.

…De bonnes lois ne sont pas celles qui sont bonnes en soi, mais celles qui sont bien faites pour le peuple.

Mille nations ont brillé sur la terre, qui n’auraient jamais pu souffrir de bonnes lois ; et celles mêmes qui l’auraient pu, n’ont eu, dans toute leur durée, qu’un temps fort court pour cela. La plupart des peuples, ainsi que des hommes, ne sont dociles que dans leur jeunesse ; ils deviennent incorrigibles en vieillissant. Quand une fois les coutumes sont établies et les préjugés enracinés, c’est une entreprise dangereuse et vaine de vouloir les réformer ; le peuple ne peut pas même souffrir qu’on touche à ses maux pour les détruire, semblable à ces malades stupides et sans courage qui frémissent à l’aspect du médecin.

Les révolutions utiles sont rares ; ce sont