Page:Rolland - Vie de Beethoven.djvu/122

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

aucune médecine, sauf, depuis quatre jours environ, des pilules pour l’estomac et une sorte de thé pour les oreilles. Je m’en trouve mieux et plus fort ; il n’y a que mes oreilles qui bruissent et mugissent (sausen und brausen) nuit et jour. Je puis dire que je mène une vie misérable. Depuis presque deux ans, j’évite toute société, parce que je ne puis pas dire aux gens : « Je suis sourd ». Si j’avais quelque autre métier, cela serait encore possible ; mais dans le mien, c’est une situation terrible. Que diraient de cela mes ennemis, dont le nombre n’est pas petit !

Pour te donner une idée de cette étrange surdité, je te dirai qu’au théâtre je dois me mettre tout près de l’orchestre pour comprendre les acteurs. Je n’entends pas les sons élevés des instruments et des voix, si je me place un peu loin. Dans la conversation, il est surprenant qu’il y ait des gens qui ne l’aient jamais remarqué. Comme j’ai beaucoup de distractions, on met tout sur leur compte. Quand on parle douce-