Page:Rolland - Vie de Beethoven.djvu/29

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Beethoven semble plus jeune que son âge, maigre, droit, raidi dans sa haute cravate, le regard défiant et tendu. Il sait ce qu’il vaut ; il croit en sa force. En 1796, il note sur son carnet : « Courage ! Malgré toutes les défaillances du corps, mon génie triomphera… Vingt-cinq ans ! les voici venus ! je les ai… Il faut que cette année même, l’homme se révèle tout entier[1]. » Mme de Bernhard et Gelinck disent qu’il est très fier, de manières rudes et maussades, et qu’il parle avec un très fort accent provincial. Mais ses intimes, seuls, connaissent l’exquise bonté qu’il cache sous cette gaucherie orgueilleuse. Écrivant à Wegeler tous ses succès, la première pensée qui lui vient à l’esprit est celle-ci : « Par exemple, je vois un ami dans le besoin : si ma bourse ne me permet pas de lui venir aussitôt en aide, je n’ai qu’à me mettre à ma table de travail ; et, en peu de temps, je l’ai tiré d’affaire…. Tu vois comme c’est char-

  1. Il débutait à peine. Son premier concert à Vienne comme pianiste, eut lieu le 30 mars 1795.