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utopies. Très Russe, de vieille souche[1], il avait une méfiance pour les nouveautés libérales, pour ces idées constitutionnelles qui venaient d’Occident ; et ses deux voyages en Europe ne firent que fortifier ses préventions. Au retour du premier voyage, il écrit :

Éviter l’ambition du libéralisme[2].

Au retour du second, il note que « la société privilégiée » n’a aucunement le droit d’élever à sa manière le peuple qui lui est étranger[3]

Dans Anna Karénine, il expose largement son dédain pour les libéraux. Levine refuse de s’associer à l’œuvre des institutions provinciales pour instruire le peuple et aux innovations à l’ordre du jour. Le tableau des élections à l’assemblée provinciale des seigneurs montre le marché de dupe que fait un paya, en substituant à son ancienne administration conservatrice une administration libérale. Rien de changé, mais un mensonge de plus et qui n’a point l’excuse ou la consécration des siècles.

« Nous ne valons peut-être pas grand’chose, dit le représentant de l’ancien régime, mais nous n’en avons pas moins duré mille ans. »

Et Tolstoï s’indigne contre l’abus que les libé-

  1. « Pur Russe de la vieille Moscovie, dit M. A. Leroy-Beaulieu, Grand-Russien au sang slave, mâtiné de finnois, physiquement un type du peuple plus que de l’aristocratie ». (Revue des Mondes, 15 décembre 1910.)
  2. 1857.
  3. 1862.