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Agénor Clerambault, assis sous la tonnelle de son jardin de Saint-Prix, lisait à sa femme et à ses enfants l’Ode qu’il venait d’écrire à la Paix souveraine des hommes et des choses : Ara Pacis Angustae. Il y voulait célébrer l’avènement prochain de la fraternité universelle.

C’était un soir de juillet. Sur la cime des arbres un dernier rayon rosé était posé. À travers la buée lumineuse, jetée comme une voilette sur la pente des collines et sur la plaine grise et la Ville lointaine, les vitres de Montmartre flambaient d’étincelles d’or. Le dîner venait de finir. Clerambault, appuyé sur la table non desservie, promenait, en parlant, son regard plein d’une joie naïve, de l’un à l’autre de ses trois auditeurs. Il était sûr d’y trouver le reflet de son contentement.

Sa femme Pauline avait peine à suivre le vol de ses images : toute lecture à haute voix la faisait tomber, dès la troisième phrase, dans un état de somnolence où les soucis du ménage prenaient une place