Aller au contenu

Page:Rolland Les origines du théâtre lyrique moderne.djvu/47

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

LE MADRIGAL DRAMATIQUE. 33

teurs sont des lettrés ; toutes les résistances viennent du camp des musiciens. Ils sentent le tyran qu'on veut introduire chez eux; ils veulent bien que la révolution dramatique ait lieu, mais à l'intérieur de la symphonie musicale, et non pas au dehors. — Il semble qu'il en ait été de même dans le dithyrambe athénien, et que les vieux poètes aient eu la même crainte de laisser s'échapper de leurs chants , affranchis du lyrisme, et le contrai- gnant à son tour aux lois de leur propre vie , les figures drama- tiques, les êtres qui passaient dans leur libre fantaisie. — Dans l'un et l'autre cas , on voit le passage à regret, mais irrésistible- ment, du chœur dramatique au drame avec chœurs.

Les compositeurs italiens tiennent bon jus(fu'à la fin du siè- cle. Les fêtes des noces princières de Florence en témoignent éloquemment. En 1539 (1), comme en 1565 (2) et en 1589 (3), le madrigal triomphe, avec les noms les plus illustres de la musi- que. — Tout au plus font-ils des concessions dérisoires à la ten- dance du chant vers l'individualisme. Dans la fête de 1539 (4), Silène chante seul; mais son chant n'est que la partie supérieure d'un madrigal , dont l'orchestre complète l'harmonie. L'ensemble seul a une signification nette; les fragments isolés ne vivent pas en dehors de leur groupement; ce n'est donc pas là une mélodie.

Nous avons peine à comprendre aujourd'hui cette obstination

(1) Noces de Cosimo Medici et de M me Leonora de Tolède. — Musique de Francesco Gortcccia, Costanzo Festa, Mattio Rarnpollini, Joa. Petrus Masa- conus, Bacio Moschini.

(2) Noces de Francesco Medici et de la reine Giovanna d'Autriche. — Musique de Francesco Corteccia et Alessandro Strigio.

(3) Noces de Ferdinando Medici et de M me Cristiana de Lorraine. — Musique de Luca Marenzio, Cristoforo Malvezzi, Emilio de Cavalieri, Péri, comte de Vernio.

(Madrigaux à 3, 4, 5, 6, 8 voix. — Dialoghi à 12, 15, 18, 30 voix. — Stances chantées à 5 et 8 voix. — Morceaux instrumentaux, ou symphonies à 6 parties. — Ballets).

Voir les descriptions de ces fêtes dans l'ouvrage cité de Kiesewetter; M. Chouquet (Hist. de la musique dramatique en France) a donné le récit de la comédie de 1589, d'après la description de Bastiano de Rossi. On trouvera dans la Bibliographie de Vogel la transcription exacte de la pré- face et des notes à l'édition de 1591, par Malvezzi. On corrigera ainsi certaines erreurs des historiens précédents.

(4) Musique de Corteccia. — Francesco Corteccia, d'Arezzo, lo plus grand compositeur de ce temps avec Striggio, était d'état ecclésiastique. Il avait sans doute été l'élève de François do Layolle, organiste et compositeur. Chapelain de S. Lorcnzo en 1531, il en devint organiste, puis chanoine et maître de chapelle, puis directeur des concerts de la cour. Il fut maître do L. Buti, qui eut pour élève Marco da Gagliano.

3 '

�� �