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la vie de Michel-Ange

Michel-Ange frappa plus durement encore ceux de son humble ami. Il alla à Paris, pour montrer le tableau de la Léda au roi. François Ier était absent ; Antonio laissa la Léda en garde chez un Italien de ses amis, Giuliano Buonaccorsi, et revint à Lyon où il s’était fixé. Quand il retourna à Paris, quelques mois plus tard, la Léda avait disparu : Buonaccorsi l’avait vendue, pour son compte, à François Ier. Antonio, affolé, sans ressources, incapable de se défendre, perdu dans cette ville étrangère, mourut de chagrin, à la fin de 1533.

Mais, de tous ses aides, celui que Michel-Ange aima le mieux et à qui son affection assura l’immortalité, fut Francesco d’Amadore, surnommé Urbino, de Castel Durante. Il était depuis 1530 au service de Michel-Ange, et il travailla sous ses ordres au tombeau de Jules II. Michel-Ange s’inquiétait de ce qu’il deviendrait après lui.

« Il lui disait : « Que feras-tu, si je meurs ? »

« Urbino répondit : « Je servirai un autre. »

« — Ô malheureux ! dit Michel-Ange, je veux remédier à ta misère. »

« Et il lui donna 2.000 écus d’un coup : un présent comme seuls les empereurs et les papes en peuvent faire. »[1]

Ce fut Urbino qui mourut le premier.[2] Le lendemain de sa mort, Michel-Ange écrivait à son neveu :

Urbino est mort, hier au soir, à quatre heures. Il m’a laissé si affligé et si troublé qu’il m’eût été plus doux de

  1. Vasari.
  2. Le 3 décembre 1555, peu de jours après la mort du dernier frère de Michel-Ange, Gismondo.
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