Page:Rollinat - Paysages et paysans.djvu/265

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Si j’suis si gros, q’ça m’gên’ quand j’bouge,
Si j’ai l’teint si frais, l’corps si gras,
C’est q’par le nez, la bouch’, les bras,
Tout l’temps j’pompais vif du sang rouge.

L’animal ? c’est pas un’ personne…
Que j’me disais ! Pour moi, l’bestiau
C’était qu’un’ chos’, j’trouvais idiot
D’croir’ que ça rêv’ ou q’ça raisonne.

Si ça qui grogn’, qui bêl’, qui beugle,
À l’abattoir s’tenait pas bien,
J’cognais d’sus, ça n’me faisait rien :
J’leur étais aussi sourd qu’aveugle.

D’un coup d’maillet bien à ma pogne
J’défonçais l’crâne d’un vieux bœuf
Comme on cass’ la coquill’ d’un œuf,
Et j’fredonnais pendant ma b’sogne.

À ceux qui, lorsque l’couteau rentre,
S’lamentaient sur l’ouaill’ ou l’cochon,
J’criais : « Ça s’rait plus folichon
D’en avoir un morceau dans l’ventre ! »