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Page:Rollinat - Paysages et paysans.djvu/272

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L’ANCIEN SOLDAT


Indépendant d’instinct, d’esprit, d’âme et de fibre
Et rendu toujours plus jugeur sain, penseur libre,
Par son métier rôdant de pêcheur-braconnier,
Le vieil ancien soldat, franc comme son visage,
Évoquait devant moi ce souvenir guerrier
Qu’il concluait ainsi de façon simple et sage :

« Des marécag’ de sang qui s’fige et qui s’grumelle
Où q’l’on voit dans des coins, noirs comm’ du jus d’fumier,
Avec des bouts d’entraill’ et des éclats d’cervelle,
Des cadav’ en morceaux et d’autr’ dans leur entier ;

Chefs, soldats, jeun’s et vieux, les géants, les minimes,
Tous en figur’ de cire et barbouillés d’caillots ;
Des Turcos s’finissant qui grincent comm’ des limes,
Montrant leur ventr’ qui bâille en perdant ses boyaux ;