Voilà qui est assurément plus que l’amour. Voilà qui est le signe de la prédestination véritable, par quoi un homme et une femme semblent marqués pour de grandes œuvres. L’âme tendre et passionnée de Marguerite Albana forme ainsi autour de la figure d’Édouard Schuré une auréole ardente, qui s’est à jamais fondue avec l’âme du voyant-poète et lui donne tout son rayonnement. Au long des âges, elle éclairera ce prodigieux effort ésotérique où, durant les hivers florentins, sur les rives de cet Arno aux bras d’argent en guirlande, elle poussa doucement, de sa belle confiance d’amante et avec les mots divins que sait l’amour, l’audacieux mystique qui se posa un jour le fabuleux problème de la Vie.
C’est à sa mort, survenue à Livourne en 1887, que le poète Schuré se fit le serment d’aller plus avant que le rythme des mots, qu’il promit à l’ombre bien-aimée d’exécuter les chers desseins consolateurs, de vouer sa vie entière aux religions des siècles, aux fols élans de la terre depuis qu’il est des hommes, de soulever les voiles de l’Orient jonché d’icônes, de promener une grande torche éblouissante parmi les sanctuaires de l’Espoir, de révéler à tous le travail occulte des âmes du monde, acharnées à percer ce troublant rideau qu’éclaboussent, aux nuits sereines de l’été, les pointes lancinantes des astres, — comme des dagues.