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DES ODES.

Reçoy donque ceſte largeſſe,
Et croy que c'eſt vne richeſſe
Qui par le temps ne s'vſe pas,
Mais contre le temps elle dure,
Et de ſiecle en ſiecle plus dure
Ne donne point aux vers d'apas.
L'audacieuſe encre d'Alcee
Par les ans n'eſt point effacée,
Et viuent encore les ſons
Que l'amante bailloit en garde
A ſa Tortue babillarde
La compagne de ſes chanſons.
Mon grand Pindare vit encore,
Et Simonide, & Steſichore,
Sinon en vers au moins par nom:
Et des chanſons qu'a voulu dire
Anacreon deſur ſa Lyre,
Le temps n'efface le renom.
N'as-tu ouy parler d'Enee,
D'Achil, d'Aiax, d'Idomenee?
A moy ſemblables artiſans
Ont immortalizé leur gloire,
Et fait allonger la memoire
De leur nom iuſques à nos ans.
Helene Greque eſtant gaignee
D'vne perruque bien peignee,
D'vn magnifique accouſtrement,
Ou d'vn Roy trainant grande ſuite
N'a pas eu la poitrine cuite
Seule d'amour premierement.
Hector le premier des gendarmes
N'a ſué ſous le faix des armes,