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Page:Ronsard - Œuvres complètes, Garnier, 1923, tome 1.djvu/27

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PIERRE DE RONSARD

prunte à l’Antiquité ou à l’Italie, comme à un fonds commun où tout le monde a déjà puisé et où chacun sans scrupule puisera encore. C’est le style, le mouvement, l’adaptation nouvelle qui comptent, et toute idée de plagiat est écartée. Ronsard et les siens se font gloire d’un bel emprunt à d’autres langues, comme d’une conquête, et le Commentaire de Marc-Antoine de Muret sur les Amours de son ami, notant avec complaisance en chaque passage l’application de la doctrine, en fait un titre de plus à la reconnaissance des Français. Ce commentaire, tout à fait analogue à ceux dont les humanistes enrichissaient alors les éditions des illustres Anciens, était utile à beaucoup de lecteurs, qui voulaient bien admirer l’auteur à la mode, mais que déroutaient à chaque instant l’abus de ses fables grecques et de ses vocables inusités. Muret rendait un véritable service à Ronsard, en l’éclaircissant comme un auteur difficile ; mais le livre avait assez de parties vivantes pour obtenir un succès durable, et c’était précisément ce que le poète y mettait de personnel dans l’expression de l’amour.

Parmi les poètes de l’amour, Ronsard tient rang d’inventeur. Il use de modèles littéraires, de parures mythologiques, des thèmes platoniciens de Pétrarque et de Bembo ; mais c’est la vérité d’une passion jeune, ardente, sincère, qui se livre en ses premiers recueils, comme se révélera dans les