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Page:Ronsard - Œuvres complètes, Garnier, 1923, tome 2.djvu/316

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Si ton corps d’un atome, et ton nez de mastin
Cherche tant à picquer la peau d’une Déesse,
En lieu d’elle, Cusin, la mienne je te laisse :
Succe la, que mon sang te soit comme un butin.
Cusin, je m’en desdy : hume moy de la belle
Le sang, et m’en apporte une goutte nouvelle
Pour gouster quel il est. Ha, que le sort fatal
Ne permet à mon corps de prendre ton essence !
Repicquant ses beaux yeux, elle auroit cognoissance
Qu’un rien qu’on ne voit pas, fait souvent un grand mal.


XVII

Amour, tu me fis voir pour trois grandes merveilles
Trois sœurs allant au soir se promener sur l’eau,
Qui croissent à l’envy, ainsi qu’au renouveau
Croissent en l’Oranger trois Oranges pareilles.
Toutes les trois avoient trois beautez nompareilles :
Mais la plus jeune a voit le visage plus beau,
Et sembloit une fleur voisine d’un ruisseau,
Qui mire dans ses eaux ses richesses vermeilles.
Ores je souhaitois la plus vieille en mes vœux,
Et ores la moyenne, et ores toutes deux :
Mais tousjours la plus jeune estoit en ma pensée,
Et priois le Soleil de n’emmener le jour :
Car ma veuë en trois ans n’eust pas esté lassée
De voir ces trois Soleils, qui m’enflamoient d’amour.


XVIII

Genévres herissez, et vous Houx espineux,
L’un hoste des deserts, et l’autre d’un bocage :