Page:Ronsard - Œuvres complètes, Garnier, 1923, tome 2.djvu/87

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Pauvret (respond Amour) et quoy ? ignores-tu
La rigueur, la douceur, la force et la vertu
Des beaux yeux de t’amie ?
Plus je respan de traits sur hommes et sur Dieux,
Et plus en un moment m’en fournissent les yeux
De ta belle Marie.


BELLEAU Amour, dy moy de grace.) Il demande à Cupidon qui est celuy qui le fournit de fleches, veu qu’il n’en est jamais desgarny, et que sans donner trefve à ses petits .bras, il tire continuellement aux cœurs des Dieux et des hommes. Puis par une gentille invention il demande, si c’est point Mars ou Vulcan, l’un pour en avoir à com mandement, comme chef et capitaine d’armes, l’autre pour en estre l’artizan et le forgeron. En fin Amour luy fait responce, que les beaux yeux de sa Marie sont la boutique où il se charge de traits, tant pour descocher sur les Dieux que sur les hommes. Amour, dy moy de grace.) Tout est de Manille, Cum tôt tela die protervè spargas, Tot figas sine fine et hic, et illic.


XXXV

J’ay pour maistresse une estrange Gorgonne,
Qui va passant les Anges en beauté :
C’est un vray Mars en dure cruauté,
En chasteté la fille de Latonne.
Quand je la voy, mille fois je m’estonne,
La larme à l’œil, ou que ma fermeté
Ne la flechit, ou que sa dureté
Ne me conduit d’où plus on ne retourne.