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Page:Ronsard - Choix de poésies, édition 1862, tome 1.djvu/245

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Quand tu verras ta peau toute ridée
Et tes cheveux chenus,


Contre le temps et contre toi rebelle
Diras, en te tançant.
Que ne pensai-je, alors que j'étais belle,
Ce que je vais pensant ?


Ou bien pourquoi à mon désir pareille
Ne suis-je maintenant ?
La beauté semble à la rose vermeille
Qui meurt incontinent.


Voilà les vers tragiques et la plainte
Qu'au ciel tu enverras,
Tout aussitôt que ta face dépeinte1
Par le temps tu verras.


Tu sais combien ardemment je t'adore,
Indocile à pitié,
Et tu me fuis, et tu ne veux encore
Te joindre à ta moitié.


O de Paphos et de Cypre régente,
Déesse aux noirs soureils2 !
Plus tôt encor que le temps, sois vengeante
Mes dédaignés soucis;


Et du brandon dont les cœurs tu enflammes
Des juments tout autour,
Brûle-la-moi, afin que de ses flammes
Je me rie à mon tour.


2 Dépeinte : décolorée.
2 Vénus.