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XVIII

Cruelle, il suffisoit de m’avoir pouldroyé,
Outragé, terrassé, sans m’oster l’espérance.
Tousjours du malheureux l’espoir est l’asseurance :
L’amant sans espérance est un corps fouldroyé.

L’espoir va soulageant l’homme demy-noyé :
L’espoir au prisonnier repromet délivrance :
Le pauvre par l’espoir allège sa souffrance :
Pandore au genre humain a ce bien octroyé.

Ny d’yeux ny de semblant vous ne m’estes cruelle :
Mais par l’art cauteleux d’une voix qui me geile,
Vous m’ostez l’espérance et desrobez mon jour.

O douce tromperie aux Dames coustumiere !
Qu’est-ce parler d’amour sans point faire l’amour,
Sinon voir le Soleil sans aimer sa lumière ?