Page:Rosny - La Guerre du feu.djvu/136

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des glands et des racines, parfois des châtaignes, croquaient des faînes et des noyaux, tiraient des sèves douces aux érables.

Le Feu était leur joie et leur peine. Par les ouragans ou les pluies torrentielles, ils le défendaient avec ruse et acharnement. Quelquefois, lorsque l’eau coulait trop épaisse et trop opiniâtre, un abri devenait nécessaire ; s’il n’était offert ni par les rocs, ni par les arbres, ni par le sol, il leur fallait le creuser ou le construire. Ainsi perdaient-ils beaucoup de jours. Ils en perdaient aussi à contourner les obstacles. Pour avoir voulu couper au plus droit, peut-être avaient-ils allongé leur voyage. Ils l’ignoraient, ils marchaient vers le pays des Oulhamr, au fil de l’instinct et en se rapportant au soleil, qui donnait des indications grossières mais incessantes.

Ils parvinrent au bord d’une terre de sable, entrecoupée de granit et de basalte. Elle semblait barrer tout le nord-occident, chenue, misérable et menaçante. Parfois elle produisait un peu d’herbe dure ; quelques pins tiraient des dunes une vie pénible ; les lichens mordaient la pierre et pendillaient en toisons pâles ; un lièvre fiévreux, une antilope rabougrie filaient au flanc des collines ou dans les détroits des mamelons. La pluie devenait plus rare ; des nuages maigres roulaient avec les grues, les oies et les bécasses.

Naoh hésitait à s’engager dans cette contrée lamentable. Le jour tournait à son déclin, une lueur terreuse glissait sur l’étendue, le vent courait, sourd et lugubre.

Tous trois, la face tournée vers les sables et les rocs, sentirent le frisson du désert passer sur leurs nuques. Mais, comme ils avaient de la chair en abondance et que la flamme luisait, claire, dans les cages, ils marchèrent vers leur sort.

Cinq jours s’écoulèrent sans qu’ils vissent la fin des