Page:Rosny - La force mystérieuse, 1914.djvu/36

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sée qu’elle agirait avec Pierre comme la société avec Langre…

Son âme pathétique subit le drame ; l’illusion fut totale, car elle aima Vérannes. Elle ne l’aima pas comme elle eût aimé un homme mieux nuancé et plus adapté à sa nature, mais enfin elle l’aima. Le sort social est aussi restreint que complexe. Ceux qui furent construits les uns pour les autres se frôlent dans la rue, au théâtre et dans les salons, mais, si proches, sont à des distances incommensurables – ou plutôt, des isolateurs subtils les séparent. Par suite, les choix sont falsifiés. Une obscure fortune les détermine où notre action propre est négligeable… Sabine subit Vérannes parce que les combinaisons de l’heure, des rencontres et des coïncidences l’avaient décidé.

Ensuite, elle paya. Enchaînée, rudoyée de jalousie, asphyxiée d’inquiétude, elle vécut la vie rongeuse des femmes autour desquelles rôde le soupçon. Parce que son compagnon l’aimait, elle devint une petite