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DES AILES !

Au bout d’une quarantaine de jours, Gredel fut prise d’une tristesse plus profonde. Elle n’avait plus guère le courage de sortir. Elle se réfugiait au haut du castel, sur une terrasse, assez large, mais surtout fort longue. On y accédait par un escalier de granit, qui aboutissait à une des extrémités, et, de là, on pouvait contempler le vaste horizon de pâturages, de bois et de collines. C’est au crépuscule que Gredel aimait s’y réfugier. Souvent, elle y était encore lorsque se levaient les premières étoiles. Là, elle rêvait à tout ce qui hante une âme neuve, pour qui le monde est infini et le temps éternel. Ceux ou celles qui étaient chargés de la garder se bornaient à occuper l’escalier de granit ; il n’y avait aucune autre issue.

Quand elle en redescendait, il lui arrivait de rencontrer Hans qui fumait son manille ou sa pipe :

— Nous sommes allés faire une causette avec les nuages ? goguenardait-il. Ça tient encore ?

— Ça tiendra toujours !

Il fronçait les sourcils ou se mettait à sourire :

— Toujours, ça n’est ni allemand, ni français ! dit-il une fois.

— C’est alsacien ! répliqua-t-elle.

Un soir, elle s’attarda plus encore que d’habi-