Page:Rostand - Chantecler.djvu/121

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CHANTECLER.

Oui, je sens que je vais le dire, et que j’ai tort !
Tout ça, parce qu’elle a sur la tête de l’or !

Il marche brusquement sur elle.

Seras-tu digne, au moins, d’avoir été choisie ?
Jusqu’au fond ta poitrine est-elle cramoisie ?

LA FAISANE.

Parle !

CHANTECLER.

Parle ! Regarde-moi, Faisane, et, s’il se peut,
Tâche de découvrir toi-même, peu à peu,
Cette vocation dont ma forme est le signe.
Reconnais tout d’abord mon destin à ma ligne,
Et que, cambré comme une trompe, m’incurvant
Comme une espèce de cor de chasse vivant,
Je suis fait pour qu’en moi le son tourne et se creuse
Autant que pour nager fut faite la macreuse !
Attends !… Constate encor qu’impatient et fier
Et grattant le gazon de mes griffes, j’ai l’air
De chercher dans le sol, tout le temps, quelque chose…

LA FAISANE.

Eh bien ! mais vous cherchez des graines, je suppose ?

CHANTECLER.

Non ! ce n’est pas cela que jamais j’ai cherché.
J’en trouve, quelquefois, par-dessus le marché,
Mais, dédaigneusement, je les donne à mes poules !

LA FAISANE.

Alors, griffant toujours la terre que tu foules,
Que cherches-tu ?

CHANTECLER.

Que cherches-tu ? L’endroit où je vais me planter.
Car toujours je me plante au moment de chanter.
Observe-le !

LA FAISANE.

C’est juste, et puis tu t’ébouriffes.