Page:Rostand - Chantecler.djvu/134

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Et comme tous les coqs chantent dans la plaine, il ajoute doucement :

Ça ne fait rien. Il a les fanfares des autres.

LA FAISANE, surprise.

Comment ! quand il paraît il n’entend pas les vôtres ?

CHANTECLER.

Non, jamais.

LA FAISANE, se révoltant.

Non, jamais. Mais alors, il croit peut-être bien
Que c’est eux qui l’ont fait lever ?…

CHANTECLER.

Que c’est eux qui l’ont fait lever ?… Ça ne fait rien !

LA FAISANE.

Mais…

CHANTECLER.

Mais… Chut ! Viens sur mon cœur, que je te remercie.
L’aurore n’a jamais été plus réussie.

LA FAISANE.

Mais par quoi serez-vous payé de votre mal ?

CHANTECLER.

Par les bruits de réveil qui montent de ce val !

En effet, les rumeurs de la vie commencent à monter.

Dis-les-moi. Je n’ai plus la force de les suivre.

LA FAISANE, qui court se pencher au bord du promontoire, et écoute.

J’entends un doigt qui frappe au bord du ciel de cuivre…

CHANTECLER, les yeux fermés.

L’Angélus.

LA FAISANE.

L’Angélus. D’autres coups qui semblent être un peu
Un Angélus de l’homme après celui de Dieu…

CHANTECLER.

La forge.

LA FAISANE.

La forge. Un meuglement, puis un chant…

CHANTECLER.

La forge. Un meuglement, puis un chant… La charrue.