Page:Rostand - Chantecler.djvu/182

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UN PADOUE, s’avançant en hâte.

Moi ! — J’ai l’air d’un palmier !

UN CHINOIS, repoussant le Padoue.

Moi ! — J’ai l’air d’un palmier ! Et moi, d’une pagode !

UN ÉNORME PATTU, repoussant le Chinois.

Moi ! — Je porte un chou-fleur à mon calcanéum !

CHANTECLER.

Chacun est à la fois le Monstre et le Barnum !

TOUS, paradant et défilant sous les yeux du Paon.

Voyez mon bec ! — Voyez mes pieds ! — Voyez mes plumes !

CHANTECLER, leur criant tout d’un coup.

Ah ! puisque vous ouvrez un tournoi de costumes,
Le vent vous fait bénir par un Épouvantail !

En effet, derrière eux, le vent a soulevé les bras de l’Épouvantail, qui, mollement, s’étendent au-dessus de cette mascarade
TOUS, reculant.

Hein ?

CHANTECLER.

Hein ? Et ce Mannequin parle à cet Éventail !

Et, tandis que le vent passe, en leur prêtant une vie étrange, dans les loques vides et trouées :

Que dit le pantalon en dansant une gigue ?
Mais… « Je fus à la mode ! » — Et, terreur du becfigue,
Que dit le vieux chapeau qu’un pauvre refusa ?
Mais… « Je fus à la mode ! » — Et l’habit ?… « Je fus à
La mode ! » — Et ses deux bras que nul ne raccommode
Veulent saisir le vent qu’ils prennent pour la mode…
Et retombent ! — Le vent est loin !

LE PAON, aux animaux qui restent un peu effrayés.

Et retombent ! — Le vent est loin ! Mais, pauvres fous !
L’Objet ne parle pas !

CHANTECLER.

L’Objet ne parle pas ! L’Homme dit ça de nous !