Page:Rostand - Chantecler.djvu/230

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LA FAISANE, allant et venant rageusement.

Je veux tout balayer de ma plume alezane,
Moi !

CHANTECLER.

Moi ! Qui donc êtes-vous, vous ?

Ils sont maintenant dressés l’un contre l’autre, se bravant du regard.
LA FAISANE.

Moi ! Qui donc êtes-vous, vous ? Je suis la Faisane
Qui du mâle superbe a pris les plumes d’or !

CHANTECLER.

Vous n’en restez pas moins une femelle encor
Pour qui toujours l’idée est la grande adversaire !

LA FAISANE, criant.

Serre moi sur ton cœur, et tais-toi !

CHANTECLER, dans une étreinte brutale.

Serre moi sur ton cœur, et tais-toi ! Je te serre,
Oui, sur mon cœur de Coq !

Et avec un regret infini.

Oui, sur mon cœur de Coq ! Mais c’eût été meilleur
De te serrer contre mon âme d’Éveilleur !

LA FAISANE.

Me tromper pour l’Aurore ! — Eh bien, quoi qu’il t’en coûte,
Trompe-la pour moi !

CHANTECLER.

Trompe-la pour moi ! Moi ! Comment ?

LA FAISANE, frappant le sol du pied, et d’un ton capricieux.

Trompe-la pour moi ! Moi ! Comment ? Je veux…

CHANTECLER, épouvanté.

Trompe-la pour moi ! Moi ! Comment ? Je veux… Écoute…

LA FAISANE.

… Que tu restes un jour sans chanter !

CHANTECLER.

… Que tu restes un jour sans chanter ! Moi !

LA FAISANE.

… Que tu restes un jour sans chanter ! Moi ! Je veux