Page:Rostand - Chantecler.djvu/40

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LE MERLE.

C’est Quand il fait ce bruit dans sa gorge, en marchant,
C’est qu’il aime une poule ou qu’il médite un chant.

CHANTECLER, immobile sur le mur, la tête haute.

Flambe !… Illumine !…

LE MERLE.

Flambe !… Illumine !… Il dit des mots sans suite !

CHANTECLER.

Flambe !… Illumine !… Il dit des mots sans suite ! Embrase !

UNE POULE.

Il s’arrête, une patte en l’air…

CHANTECLER, avec une sorte de râle de tendresse.

Il s’arrête, une patte en l’air… Cô…

LE MERLE.

Il s’arrête, une patte en l’air… Cô… C’est l’extase !

CHANTECLER.

Ton or est le seul or qui soit de bon conseil !
— Je t’adore !

LE PIGEON, à mi-voix.

— Je t’adore ! À qui donc parle-t-il ?

LE MERLE, d’un ton gouailleur.

— Je t’adore ! À qui donc parle-t-il ? Au soleil !

CHANTECLER.

Toi qui sèches les pleurs des moindres graminées,
Qui fais d’une fleur morte un vivant papillon,
Lorsqu’on voit, s’effeuillant comme des destinées,
Lorsqu’Trembler au vent des Pyrénées
Lorsqu’Les amandiers du Roussillon,

Je t’adore, Soleil ! ô toi dont la lumière,
Pour bénir chaque front et mûrir chaque miel,
Entrant dans chaque fleur et dans chaque chaumière,
Lorsqu’Se divise et demeure entière
Lorsqu’Ainsi que l’amour maternel !