Page:Rouleau - Légendes canadiennes tome I, 1930.djvu/47

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Comme les temps sont changés ! Aujourd’hui, l’envie salit les plus belles actions. La médisance et la calomnie s’infiltrent dans toutes les classes de la société ; la moindre faute, qui n’est en vérité qu’une légère ondulation sur le fleuve de la vie d’un mortel, devient dans la bouche du médisant une vague énorme capable d’engloutir le navire le plus solide. Le calomniateur fait d’un innocent qui plane sur des hauteurs élevées un monstre à face humaine que la société doit rejeter de son sein. Cet homme respectable est regardé comme un lépreux, comme un paria.

Mais revenons à notre sujet. Nous étions au milieu des joyeux chasseurs, et voilà que tout à coup notre imagination nous transporte dans le monde des moralistes. Retournons encore un moment à Kamouraska, et écoutons une histoire dont l’un de ces courageux Nemrods de 1830 a été le héros. Nous tenons les faits du chasseur lui-même ; il nous a juré, par tous les dieux de la mythologie, que son récit était authentique. Il paraît que les précautions oratoires qu’il avait prises n’avaient pas encore chassé le doute de notre esprit, car Fifi, — c’est le nom du narrateur, — nous regardant dans le blanc des yeux, nous apostropha ainsi :

« Si vous n’ajoutez pas foi à mes paroles, vous