Page:Rouleau - Légendes canadiennes tome II, 1930.djvu/43

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Le jeune homme cheminait d’un pas tranquille, mais ferme ; il paraissait cependant aussi sombre que le bois qui l’environnait. Après avoir marché pendant plus d’une heure dans cette ténébreuse retraite, il s’arrêta sur un tertre assez élevé et entouré d’arbres touffus. Gaston sortit alors une corde qu’il tenait cachée sous son habit et en fixa une des extrémités à une forte branche, tout en ayant eu le soin de faire un nœud coulant à l’autre bout, qui s’arrêtait à une dizaine de pieds du sol. Il avait pris la résolution de se suicider. Le malheureux ! il n’avait de la force que pour le crime. En face de la misère, il perdait courage, et plutôt que de lutter vaillamment contre les adversités de cette vie de larmes, il avait recours au suicide, le plus grand acte de lâcheté que l’homme puisse commettre.

Gaston se préparait à grimper dans l’arbre où la corde fatale était attachée, pour se lancer ensuite dans le vide, lorsque la pensée lui vint de réciter l’Ave Maria qu’il avait promis à sa mère mourante.

« Je l’ai promis, se dit-il, et je ne veux pas manquer à ma promesse à la dernière heure de ma vie. »

Et il se jeta à genoux au pied de l’arbre. Les mains jointes et le regard tourné vers le ciel, Gaston récita avec une certaine dévotion la Salutation angélique. Lorsqu’il eut prononcé ces mots : « Priez pour nous, pauvres pécheurs, maintenant et à l’heure de notre mort, » il éclata en sanglots.