Page:Rouquette - La Nouvelle Atala, 1879.djvu/55

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aussi froide que belle, et aussi cruelle que froide et belle, pourquoi as-tu parlé ? Il fallait me laisser dans l’illusion de l’incertitude ; j’aurais rempli ma vie du seul espoir d’être un jour aussi aimé de toi que je t’aime moi-même. Ah ! tout maintenant est évanoui pour moi ! La nuit me parlera encore de toi, mais sans me promettre la couche nuptiale dans les grandes herbes de la vaste prairie, où nous aurions dormi ensemble, ignorés du monde entier… Adieu tous les rêves ! Adieu toutes les réalités ! La vie ne sera plus pour moi qu’une marche funèbre vers la tombe ! … Reste donc seule, reste libre, reste inféconde, ô vierge, qu’une louve ou une tigresse a allaitée dans la saison des glaces ! O froide fleur, ô fleur solitaire de la nuit, fleur que le soleil n’a jamais brûlée des ses rayons, fleur des cimetières, fleur des tombeaux, exhale ton parfum de mort ! » « Illusion des illusions, désespoir d’un moment, répondit Rosalie, avec un accent et une expression qui transperçaient son âme : Les passions sont semblables à ces grands orages qui dévastent la terre ; elles sont comme les eaux troublées des fleuves que les pluies font gonfler, et qui s’écoulent aussi vite qu’elles se sont enflées en écumant avec bruit dans leur fuite rapide. Je ne changerai pas le connu pour l’inconnu. Je sais de quel poids pèse sur l’âme l’asservissement du corps. Va combler de tes dons, et surtout du don de ton amour, un autre que moi. J’ai le